Les limites de l’inspection judiciaire de Scopeti (septembre 1985) – 2 sur 4
par Vieri Adriani
Vieri Adriani est avocat spécialisé en droit pénal international. Langues parlées : anglais et français
5. L’inspection du 10 septembre 1985
À la lecture du résumé du dossier des constatations techniques effectuées par la police judiciaire le 10 septembre 1985, il semblerait que les 5 premiers coups de feu correspondent à 5 des 6 douilles trouvées ce matin-là à l’aide du détecteur de métaux, juste devant la moustiquaire. Néanmoins, il n’y a pas d’herbe devant l’entrée de la tente, de sorte que l’affirmation selon laquelle le détecteur de métaux était nécessaire ne semble pas tout à fait convaincante. Il est plus probable que quelqu’un parmi les forces de l’ordre les ait prélevés le 9 et les ait replacés là devant après l’inspection du 9 septembre (septième erreur) : sinon, on ne comprend pas pourquoi personne ne les a remarqués la veille, le 9 septembre, pas même le magistrat chargé de l’affaire, sans parler du professeur Maurri, du professeur De Fazio et des autres officiers de police judiciaire présents sur place.
Une sorte de photo circule sur Internet, constituant la transformation en noir et blanc d’une photo en couleur (tirée du procès-verbal de l’inspection du 10 septembre 1985 et désaturée), où l’on voit des douilles, brillantes et dorées, placées juste en face de l’entrée de la tente, dans une position légèrement différente de celle fournie par la reconstitution officielle. La source de la photo est toutefois imprécise et non spécifique : une cour d’assises la rejetterait certainement aujourd’hui comme preuve, car elle a été manipulée. En particulier, la douille (A) ne se trouverait plus « à 95 cm du matelas », mais beaucoup plus près, à environ une dizaine de centimètres. Est-il possible que les hommes de la police scientifique et le magistrat lui-même n’aient pas vu les douilles qui semblent pourtant si clairement visibles sur la photo en question ?
Il y a manifestement quelque chose qui cloche. Le fait est que, puisqu’il s’agit de six douilles et non d’une seule, leur non-détection constitue une lacune supplémentaire inexplicable, la septième, commise par les enquêteurs lors de l’inspection, à moins de supposer que les premiers intervenus les aient prélevées puis replacées tant bien que mal. Ce n’est pas à nous de le dire, nous ne pouvons que faire des hypothèses, mais nous avons une source.
6. Les preuves balistiques — prélèvement et répertoriage
Douilles répertoriées
Comme l’a souligné notre consultant médico-légal, le Dr Edoardo Franchi, les douilles C, D, G ont été répertoriées immédiatement le jour 9 ; a, c, f g, h, e ont été répertoriées le lendemain, le jour 10. Les douilles c, f, g, h et e se trouvent juste devant la moustiquaire (entrée de la tente) et sont attribuées aux cinq premiers coups tirés alors que la moustiquaire était peut-être encore fermée.
Les douilles – a, D – se trouvent également devant l’entrée de la tente, mais beaucoup plus loin que les cinq autres : selon une reconstitution officielle, elles auraient été tirées contre JMK après qu’il ait réussi à sortir de la tente, surprenant un instant son agresseur.
La douille G, située à l’intérieur de la tente, juste après le seuil d’entrée, est attribuée dans la version officielle à un coup tiré après les douilles c, f, g, h et e.
Il en va de même pour la douille C, gisant sur le côté droit de la tente (en regardant l’entrée depuis l’extérieur).
Balles répertoriées
Toujours selon la reconstitution du Dr Edoardo Franchi, quatre balles ont été répertoriées :
-tête NM, déformée,
-sein gauche NM, déformée et superficielle,
-humérus droit de JMK
-à l’intérieur de la tente, fragmentée, entre le drap et le matelas
Une cinquième balle n’a été répertoriée qu’en 2015, sur indication de l’auteur et de son collaborateur, le médecin légiste Edoardo Franchi, qui avait remarqué sa présence possible (et peut-être même celle d’une deuxième balle non répertoriée à ce jour), en dépoussiérant – c’est le cas de le dire – en juin/juillet 2010, le rapport rédigé par le professeur Maurri qui, 25 ans auparavant, avait déjà émis l’hypothèse de sa présence (à tel point qu’une demande de récupération avait été formulée au procureur général, datée du 30 juillet 2010).
7. Les éléments trouvés sur le cadavre, les reproductions photographiques et leur signification
Les éléments prélevés à l’issue de l’autopsie sont confirmés par le dossier photographique de la police scientifique. La femme a reçu 5 coups de feu et 1 coup d’arme blanche non mortel. Trois écorchures au visage sont également décrites sommairement. Il n’y a pas de signes évidents de frottement au sol ou de salissures terreuses, du moins selon les enquêteurs, mais cela peut être mis en doute.
L’homme a reçu 4 coups de feu + 9 coups d’arme blanche aux organes vitaux + 3 autres coups d’arme blanche non mortels, dont 1 dans le dos et 2 à l’aine.
Les reproductions photographiques de l’état de conservation des cadavres, selon une première interprétation déjà exprimée à l’époque par le professeur De Fazio lui-même, puis partagée par le médecin légiste Dr Edoardo Franchi, ancien consultant médico-légal de l’auteur, confirment que la mort peut être antidatée, probablement au samedi 7 (50 %), sans toutefois exclure, sur le plan de la raison scientifique, ni le vendredi 7 (25 %), ni le dimanche 8 (25 %), comme on le verra au point 10 ci-dessous. Voir également l’intervention suivante du même expert technique de la défense, qui sera publiée prochainement, concernant les résultats de l’examen du contenu gastrique, du rigor mortis, qui s’est résorbé spontanément à minuit le lundi 9, de l’impossibilité scientifique de sa réapparition le matin du mercredi 11 sur la table d’autopsie et enfin de l’étude de l’évolution des larves présentes sur les deux cadavres.
Une autre erreur des enquêteurs, la huitième, consiste donc à n’avoir pris en considération qu’une seule date, celle du dimanche 8 septembre, pour vérifier les alibis et les témoignages, vérification qui aurait dû être étendue, par prudence et pour l’exhaustivité de l’enquête, à couvrir les trois jours : vendredi 6, samedi 7 et dimanche 8 septembre, au lieu de se limiter de manière catégorique à ce dernier.
8. Une dynamique possible
Dans la mesure où il peut encore être utile aujourd’hui de reconstituer la dynamique d’un fait aussi ancien, alors que plus rien ne peut être utilement entrepris pour faciliter l’enquête, on peut néanmoins tenter d’en esquisser les grandes lignes. Il ne s’agit évidemment que d’une reconstitution possible, car les preuves n’offrent aucune certitude objective.
Le tireur, provenant peut-être du talus, peut-être de l’entrée principale de l’aire de stationnement (qui peut le dire ?), s’accroupit devant l’entrée et tire à l’intérieur et sur ses occupants à une distance réduite, inférieure à un mètre. Il se peut qu’à ce moment-là, les deux soient en train de s’ébattre, elle au-dessus, servant de cible, et lui en dessous, moins visible. On ne peut exclure qu’il y ait eu de la lumière à l’intérieur, mais aucune n’a été trouvée. La lampe torche à piles n’était pas dans la tente, mais dans le sac rangé dans la voiture fermée à clé. Soit la lumière a été emportée par le meurtrier, soit celui-ci portait une sorte de lampe de mineur fixée sur la tête qui lui permettait d’éclairer la scène tout en ayant les mains libres. Peut-être une sorte de lampe torche fine était-elle fixée sur le canon de son pistolet. Le tireur tire, comme indiqué, plusieurs coups et tue NM.
L’hypothèse du professeur de Fazio est différente, qui suppose une attaque par derrière, commencée par un coup de feu vers la base de la tente dont le trou a été mentionné précédemment et par la déchirure de la tente extérieure sur environ quarante centimètres, comme le montrerait la déchirure trouvée à cet endroit.
Au moment où NM est touchée par les coups mortels (un à la tempe droite), JMK est peut-être resté immobile pendant quelques instants. Le meurtrier a peut-être ouvert la moustiquaire en tirant sur la fermeture éclair et s’est penché un instant pour vérifier le résultat de son action, ce dont le jeune homme a profité pour s’enfuir. Son agresseur, qui ne s’attendait pas à cette réaction soudaine, le croyant déjà mort, a perdu l’équilibre et est peut-être tombé en arrière. Le jeune homme se tourne vers sa droite, peut-être parce qu’il ne peut pas aller à gauche en raison de la présence du tireur et/ou d’un complice, et commence à s’enfuir. Le meurtrier tire plusieurs coups de feu dans sa silhouette, certains manquent leur cible, d’autres atteignent JMK qui touche le montant gauche de la Golf et le macule de son sang. Le meurtrier tire à nouveau et l’atteint au coude droit. Aucune indication utile ne peut être tirée de la position des douilles sur le sol qui, comme indiqué, ont probablement été repositionnées par les agents après la première inspection et avant la seconde. JMK se dirige vers la rangée de buissons, puis tourne dans le sens des aiguilles d’une montre vers l’entrée de l’aire de stationnement sur la via degli Scopeti. Le meurtrier lui barre simplement le chemin et le tue de 13 coup de couteau. Selon la reconstitution du professeur De Fazio, les blessures au dos sont apparues en premier, puis la victime se serait tournée vers lui et aurait reçu des blessures défensives aux poignets/bras, puis les blessures mortelles à l’hemithorax et au foie, et enfin les blessures à l’abdomen. Effondré au sol, près de la tache de sang marquée par le marqueur approprié, JMK est traîné (ou jeté par deux personnes) sur le bord droit de la clairière où il a été retrouvé.
9. Les mutilations de Nadine
En ce qui concerne les mutilations infligées à NM, la même considération que ci-dessus s’applique : comme il n’est pas possible de privilégier une reconstitution plutôt qu’une autre, on ne peut qu’essayer d’imaginer comment elles ont été produites par l’agresseur ou les agresseurs et dans quel ordre logique, sans prétendre donner une réponse définitive.
Après avoir caché le corps de JMK, l’agresseur ou les agresseurs sont retournés à la tente pour infliger à NM un coup de couteau qui lui a laissé une blessure au cou, sur le côté gauche . En ce qui concerne les mutilations infligées ensuite au corps de NM (sein gauche et pubis), les deux experts du procureur ne sont pas tout à fait d’accord. Selon l’équipe du professeur De Fazio, l’auteur aurait opéré à l’intérieur de la tente dans un espace très restreint, en profitant d’une lumière interne entre le fond et le corps. En pratique, il aurait opéré sur le cadavre puis l’aurait laissé dans la même position dans laquelle il a été retrouvé par les premiers intervenants, c’est-à-dire allongé en position semi-fœtale sur le côté gauche. Dans cette position assez difficile pour procéder à des mutilations, selon le professeur De Fazio, l’auteur aurait d’abord prélevé le sein. Les gouttes de sang responsables des coulures évidentes sur le dos proviendraient du sein mutilé. La tache de sang à l’extérieur, à 80 cm du bord, aurait été laissée par le sein arraché, une fois posé sur le sol. Le même agresseur serait ensuite retourné dans la tente et, se plaçant sur le côté, aurait retiré le pubis en levant la jambe droite.
Selon le professeur Maurri, en revanche, l’auteur aurait partiellement sorti le corps de la tente, de sorte que la tache de sang à 80 cm correspondrait à l’endroit où il aurait posé le pubis. Il aurait d’abord retiré le pubis, puis le sein, c’est-à-dire dans un ordre inverse de celui supposé par le professeur De Fazio (d’abord le sein, puis le pubis). Il semble toutefois qu’il n’y ait pas de traces de traînée sur le dos de NM, comme l’écrit le professeur Maurri. Il n’est pas possible non plus de dire si le corps de la victime féminine a été extrait partiellement ou entièrement, et d’ailleurs, on ne voit pas quelle importance cela pourrait avoir aujourd’hui. Il est vrai que s’il l’avait retiré entièrement, il aurait été plus difficile, à la fin de la mutilation, de replacer le cadavre à l’intérieur de la tente. Il est plus probable, mais ce n’est pas certain, que l’extraction n’ait été que partielle, juste ce qu’il fallait pour effectuer plus facilement les deux mutilations, après avoir écarté les jambes pour retirer le pubis. Si l’hypothèse du professeur Maurri est valable, la tache de sang à l’extérieur peut correspondre à l’endroit où le meurtrier a momentanément déposé, indifféremment, l’un ou l’autre ou les deux de ses trophées macabres. Selon le professeur Maurri, les excisions auraient été pratiquées avec un couteau de plongée dont la lame n’était pas lisse au contact des tissus : une lame striée, décrit-il, mais sur ce point également, il semble hésitant lors du procès. Le professeur De Fazio fait allusion à des ecchymoses linéaires en série et à un défaut d’affûtage de la lame.
L’auteur estime que se perdre dans ces détails ne change pas grand-chose à la substance de l’affaire et, surtout, n’aide pas à comprendre deux points fondamentaux qui sont pourtant l’objet de l’enquête judiciaire : ni qui est l’auteur ou les auteurs, ni pourquoi ils ont agi de la manière décrite : cela suffit. (suite)
Florence, le 16 avril 2025
Vieri Adriani
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